Aujourd’hui, j’ai envie de plonger avec vous dans un sujet fondamental, qui est en fait le cœur de notre nouvel épisode de podcast « Être parents dans l’intensité ». On va parler du sentiment de sécurité intérieure, celui qui permet à nos enfants et à nous-mêmes de respirer, de fonctionner, d’arrêter de marcher sur des œufs quotidiennement.
Vous allez voir, ce n’est pas un concept abstrait. C’est super concret et facile à observer… Enfin, « facile » n’est peut-être pas le mot, surtout quand on navigue en pleine tempête émotionnelle. Mais c’est fondamental à comprendre, pour nos enfants… et pour nous aussi.
Pourquoi la sécurité est LA base de tout
On le sait intuitivement, mais on l’oublie : rien ni personne ne peut bien fonctionner sans un minimum de sécurité. Pour nos enfants « émotionnellement intenses », c’est encore plus criant. Ces petits (ou plus grands) humains ont un système d’alerte hypersensible. Là où d’autres voient juste un bruit de fond ou une simple consigne, eux, leur corps réagit souvent comme s’il y avait une réelle menace.
Leurs nerfs sont des antennes paraboliques. Leur corps, leur cerveau sont équipés d’un système ultra-rapide à déclencher le mode stress. Vous savez, le fameux fight, flight, freeze (combattre, fuir, figer)… et même un petit dernier qui arrive plus récemment : la soumission ou le « fait ce que tu veux de moi pour que ça passe ». Ces mécanismes de survie prennent toute la place… et soyons honnêtes, parfois, on aimerait bien savoir où est le bouton OFF.
Ce qu’il faut garder en tête (et ce n’est pas facile), c’est que quand un enfant ne se sent pas en sécurité, rien de ce qu’on attend de « correct » n’arrivera. Ni la coopération, ni la discussion posée, ni la gestion de leurs émotions. C’est l’urgence qui prend le dessus, peu importe si l’événement semble « ridicule » ou « anodin » de notre point de vu d’adulte.
Les différents types de besoins (et pourquoi tout commence par la sécurité)
Dans le podcast (épisode 003, si jamais vous avez envie de l’écouter/réécouter), je détaille cinq grands besoins :
- Le besoin de sécurité (celui dont on parle aujourd’hui)
- Le besoin de sentir qu’on a de la valeur
- Le besoin d’être compris et validé
- Le besoin de soutien
- Le besoin d’être soi-même, sans jugement
Ce sont des catégories, oui, mais elles s’entremêlent beaucoup dans la réalité. Quand on répond à l’un, on aide souvent les autres aussi.
Mais la sécurité, c’est la base de tout le reste. C’est le point de départ. Avant de penser à obtenir la coopération, la confiance, la politesse, il faut installer une base de sécurité.
Les réactions face à l’insécurité : ce qu’on observe chez les enfants (et chez nous)
On l’a toutes et tous vécu : ce moment où on demande un truc a priori banal (« Range tes chaussures », « Va te laver les mains », etc.), et… boum, explosion. Soit active (opposition), soit passive (l’enfant ignore, se fige, ou fait semblant de ne pas entendre), soit il fond en larmes ou… cède à tout pour qu’on le laisse tranquille.
Ce sont des réactions physiques du système nerveux, pas des plans réfléchis pour nous faire perdre patience.
Et ce qui est déroutant, c’est que ça peut être déclenché par des choses complètement « banales » à nos yeux : le bruit ambiant, une texture, une consigne incomprise, la chaleur, la faim, la fatigue, ou juste une accumulation de micro-choses qui font déborder leur vase.
Est-ce que c’est grave ? Pour eux, oui. Leur cerveau l’interprète comme un danger réel. Et notre travail, ce n’est pas de chercher la cause précise ou de minimiser, c’est d’aider à ramener le système à la sécurité.
La sécurité, une expérience individuelle et subjective
C’est délicat, mais tellement libérateur de s’en souvenir : ce qui importe, ce n’est pas notre interprétation de la situation, mais ce que l’enfant vit et ressent. Deux enfants exposés à la même situation ne réagiront jamais de la même façon.
L’événement en soi a peu d’importance. Ce qui compte, c’est la façon dont il est expérimenté, incorporé, vécu dans le corps et dans le cœur de l’enfant.
C’est pour ça qu’on ne cherche pas à identifier une « grande raison majeure » à chaque crise. Parfois, c’est un tas de petites choses qui s’accumulent.
Mais… et nous, dans tout ça ?
L’une des plus grandes révélations de mon parcours de parent (et celle que je continue de répéter à toute personne qui veut bien l’entendre), c’est qu’on ne peut pas espérer que nos enfants aillent bien si nous-mêmes, on se sent constamment insécure.
Nos besoins, à nous aussi, doivent être pris en compte : la sécurité intérieure, mais aussi la valorisation, la validation, le soutien, et le droit d’être nous, sans jugement. C’est tellement difficile, surtout dans une société qui nous pousse à faire passer tout le monde avant nous.
Mais c’est INDISPENSABLE.
Parce que nos enfants font de la corégulation avec nous. Concrètement, quand notre système nerveux est en surcharge (même silencieusement), ils le sentent et leur propre stabilité en prend un coup. À l’inverse, si on arrive à se réguler, à se sentir sécurisés, on devient une ancre. On stabilise les émotions parfois même sans rien faire d’autre que juste « être là, posés ».
Je le répète (parce qu’on a toustes besoin de l’entendre mille fois !) :
Travailler sur sa régulation, ça ne veut pas dire « rester calme à tout prix ». C’est difficile, c’est même parfois irréaliste. Ce n’est pas en récitant des mantras ou en retenant sa respiration que la magie opère… C’est en apprenant à reconnaître et à répondre à nos propres besoins. Plus on y répond, plus la régulation suit, presque sans effort conscient.
Apprendre à se connaître, petit à petit : notre travail de détective
Pour aider nos enfants, et s’aider soi-même, il s’agit finalement d’apprendre à se connaître :
– Quels sont nos déclencheurs ?
– Quels sont ceux de nos enfants ?
– Quels besoins reviennent encore et encore ?
– À quoi on réagit intensément (faim ? chaleur ? bruit ?) – et comment prévenir ?
Parfois, on oublie jusqu’à nos propres besoins parce qu’on s’est tellement effacé derrière notre parentalité, le couple, le travail… Il faut réapprendre à se demander : « De quoi ai-je besoin, là, maintenant ? »
Prendre soin de soi, ce n’est PAS un luxe. Ce n’est pas de passer la fin de semaine au spa : c’est souvent aussi simple que de boire un verre d’eau, s’assurer d’avoir mangé, ou prendre deux minutes pour respirer quand la tension monte.
Protéger et défendre les besoins de nos enfants (et les nôtres)
Quand on élève un ou plusieurs enfants intenses, on devient souvent leur voix : à l’école, à la garderie, dans la famille, au sport. Parfois il y a un diagnostic officiel, parfois non, mais il faut sans cesse expliquer, défendre, réclamer des adaptations ou simplement du respect.
Et on se heurte alors, souvent, à l’incompréhension, au jugement, voire à la critique. Rester debout, confiant.e, défendre leurs besoins, ça prend de l’énergie ET un sentiment de sécurité personnelle solide.
Pour ça, la clé reste toujours la même : renforcer notre propre confiance. Plus on est aligné.e avec ce qu’on sait être vrai pour notre enfant et pour nous, moins les commentaires extérieurs nous déstabilisent.
Un mot sur les « trucs et astuces » de parentalité positive
Peut-être que, comme moi, vous avez déjà testé 50 méthodes, lu autant d’articles conseillant de nommer les émotions, se mettre à leur niveau, etc… En espérant obtenir la coopération immédiate.
Mais notre objectif ici n’est pas la « bonne réaction » sur le moment, ou même la collaboration instantanée. Notre but, c’est la relation, la complicité, la sécurité à long terme. Quand il y a sécurité, le reste (la collaboration, la gestion émotionnelle, le développement de l’autonomie…) suit et non le contraire.
Par où commencer ?
Ce que je nous invite à faire, à petits pas :
- Observer. D’abord, simplement observer : Qu’est-ce qui déclenche le stress, l’insécurité chez notre enfant ? Et chez nous ?
- Repérer nos besoins : Essayons de voir, honnêtement, où on en est nous-mêmes. Qu’est-ce qui nous fait nous sentir bien ? Qu’est-ce qui est non négociable pour tenir le rythme (repas, sommeil, soutien, etc) ?
- Accueillir la réalité de l’intensité : Chez nos enfants comme chez nous, ça fait partie de l’histoire. Ce n’est ni bon ni mauvais. Ça demande de l’apprivoiser, et de la réguler pour que personne n’en souffre durablement.
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